BVH : La boite semi-automatique d’une DS

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On en parle souvent de cette boite . Pourtant celle ou celui qui conduit sa premiere DS équipée ainsi, risque d’être passablement déconcerté en étant mis en présence de cette dernière . C’est pour eux qu’est écrit cet article. En bons Déessistes que nous sommes, on sait de quoi on parle quand on évoque une BVH ou une BVM. Mais n’oublions pas ceux qui vont franchir le pas et nous rejoindre. Finalement on n’aborde jamais vraiment le sujet. C’est donc ce que je propose ici.

C’est l’occasion de répondre aux diverses questions qui traversent l’esprit:
Une DS équipée d’une boite 4 ou  5 vitesses à commande mécanique, se conduit de la même manière qu’une voiture actuelle, si ce n’est qu’il faut manier deux ou trois fois le levier de vitesses pour se familiariser rapidement à son utilisation (et comprendre pourquoi il y a 4 commandes sous les pieds du conducteur:  Accélérateur , »champignon » de frein, embrayage et frein de parking/secours). Le principe de la BVM est identique à un levier au plancher à grille en H, mais à mon sens plus pratique et  plus agréable à utiliser (sans compter la place dégagée au sol)

BVM DS 23 IE 1975

NYX

BVH DS 23 IE 1973

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Alors c’est quoi cette boite hydraulique ? Rien à voir avec une boite automatique, et si le système à embrayage robotisé tel une Twingo easy , y ressemble un peu, elles n’ont cependant qu’un très lointain cousinage. Malgré les 40 années qui séparent ces deux boites , celle de la DS est autrement plus sophistiquée et agréable. Assis au volant d’une BVH, on pense à première vue être en monde connu, grâce aux 3 traditionnelles commandes (accélérateur, « champignon » de freins et embrayage). Perdu ! pour ce dernier, c’est le frein de parking/secours)
La DS est équipée d’un système hydraulique, imaginé et réalisé à des époques différentes, par les deux inventeurs de génie qu’étaient Georges Messier, père de la suspension oléo-pneumatique et Paul Magès le magicien hydraulique de chez Citroën

 

Georges Messier

georges Messier

Paul Magès .

paul Magès

Dès le début de la genèse de la DS, il a été prévu un système très abouti, consistant à supprimer  la pédale d’embrayage, ce rôle étant dévolu à la pression hydraulique. Elle asservi d’une part le débrayage et l’embrayage, et d’une autre, le changement des rapports de vitesses. Contrairement à (par exemple) la Twingo easy citée plus haut, qui possède un lien mécanique traditionnel entre le levier de vitesse et la boite, sur la DS le lien est constitué de conduites hydrauliques appliquant, par l’intermédiaire d’actionneurs, la pression sur la commande d’embrayage, sur les tiroirs et verrous des différentes vitesses. En clair, la pression hydraulique engage et désengage chaque rapport, à la demande du conducteur, en même temps qu’elle commande l’embrayage. D’origine, la DS ne possédait pas de commande de boite mécanique. C’est une configuration qui a été proposée plus tard. Les ID étaient quant à elles toutes équipées d’une boite mécanique traditionnelle.

Différences BVM  / BVH  (livret de bord d’une DS 21 injection)

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Photos « in situ »

BVH 23 IE 1973

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BVM 23 IE 1975

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Les avantages ? Ils sont nombreux.
-On garde la maitrise totale de la vitesse engagée (pas de calculateur ou de programmation pour décider à notre place)
-en ville, pas besoin d’embrayer/débrayer en permanence. On peut laisser le premier rapport (voir le second) engagé et n’utiliser qu’accélérateur et freins .
-le changement de vitesses est extrêmement doux avec un passage tout aussi rapide (sinon plus) qu’avec une boite mécaniqu

-on conserve un frein moteur efficace comme sur une boite mécanique
-le positionnement de la commande (derrière le volant) fait que les changements de vitesses se font sans presque quitter le cerceau des mains, et du bout des doigts, avec une souplesse et une douceur sans commune mesure avec un levier de vitesses traditionnel.
-l’embrayage a une durée de vie bien supérieure à celle d’une boite mécanique
-les synchros de boites sont eux aussi beaucoup moins sujets à l’usure.
-Pour les réfractaires aux démarrage en côte, avec une BVH ,ce n’est qu’une formalité
-Il est impossible de caler le moteur. Quel que soit le rapport engagé (même en 4eme départ arrêté) il n’y aura jamais de calage moteur.
-Fiabilité de l’ensemble . Les pannes sont extrêmement rares, et sauf exception, aucun réglage de maintenance n’est nécessaire.

 

Les inconvénients:
-le pire de tous, c’est de ne plus jamais pouvoir se réhabituer à une boite normale. Absolument aucun système n’a l’agrément de cette boite. Que ce soit automatique, séquentiel  ou tout ce que l’on veut, une fois qu’on a gouté à la BVH,  les autres boites reçoivent alors un qualificatif peu flatteur.
-On garde à vie l’habitude de laisser son poignet nonchalamment posé au dessus du volant ,comme si on conduisait toujours une DS, et ceci jusqu’à ce qu’on en retrouve une, même bien des années plus tard
-La panne de batterie, mais surtout de démarreur est un vrai problème. A moins de connaitre quelques astuces, il sera presque impossible de démarrer dans ces conditions (poussette ou rue en pente inutiles)
-Lors d’une longue immobilisation vitesse engagée, il arrive que celle-ci (généralement 1ere ou marche arrière)  reste bloquée. Et, la aussi, si on ne connait pas l’astuce, le démarrage va devenir plus que problématique, voir carrément dangereux.
– En cas de fuite,ou de problème hydraulique,un ordre de priorité est donné au différents éléments (Freins,  direction, suspensions,  boite a vitesse) . Si la pression vient à manquer, le passage des vitesses devient de plus en plus lent, puis inexistant. La priorité absolue est donnée au freinage. La encore il y a une solution, mais comme les précédentes, elle n’est pas indiquée dans le carnet de bord ni dans la RTA.

 

Schéma grille de vitesse extrait du livret de bord (vue de dessus)

D :basculement du levier pour mise en action du démarreur. Contrairement à une BVM , la clef de contact, ne commande …que le contact. Après avoir actionné le démarreur le levier revient en position PM
PM :point mort
1 2 3 4 et AR  :Position des 4 vitesses et de la marche arrière
PD :point dur. Pour éviter un passage accidentel de la marche arrière cette sécurité oblige à forcer sur le levier pour enclencher celle-ci. C’est largement suffisant pour ne pas commettre cette erreur. Il faut ajouter que l’habitude de manœuvrer cette commande se prend si rapidement, que même lors d’une marche arrière on ne regarde jamais le levier pour l’enclencher.
Un verrouillage par bille a été prévu pour bien matérialiser chaque position du levier.  Chaque manœuvre de la commande est accompagné d’un léger bruit hydraulique qui semble donner vie au levier, participant ainsi, lui aussi à l’agrément de cette boite.

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Livret de bord

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Petit additif au livret de bord

Au point mort et avant de pousser le levier vers la 1ere vitesse , on appuie sur le champignon de freins, ce qui a pour effet immédiat d’abaisser le régime moteur. La DS ne bouge alors pas. Le fait de simplement relâcher les freins augmente le régime moteur, provoquant le « léchage de l’embrayage et préparant à un démarrage très doux  si on utilise un filet de gaz, ou le hurlement des pneus si on colle le pied à la planche (un démarrage sur les chapeaux de roues en boite hydraulique est terriblement efficace). Entre ces deux extrêmes, on dose le démarrage à sa convenance, sans se poser de question. C’est beaucoup plus simple qu’avec une boite mécanique. Il y a juste l’accélérateur à enfoncer plus ou moins.

Pour le passage de la seconde vitesse (et pour les suivantes), on peut parfaitement le faire sans relever le pied de l’accélérateur, la commande d’accélérateur va le ramener à la position optimale de débrayage/ré-embrayage (grâce à un système incorporé au correcteur de ré-embrayage sous le capot. On sent d’ailleurs la pédale durcir et même repousser le pied ), idem pour rétrograder les vitesses. Bref ,pas la peine de paniquer pour une prise en main, ça passe tout seul.

Après quelques kilomètre on « sent » très bien comment fonctionne le système, et on s’y fait très vite. Une seule réserve: Faire, lors de ces premiers kilomètres, très attention avec le pied gauche. Les freinages accidentels avec celui ci donnent une bonne idée de la solidité des dents sur le volant et du front dans le pare-brise (sans compter le vol plané des passagers arrières, les ceintures n’étant pas obligatoirement installées pour eux) .
Par contre, avec l’habitude, on utilisera vite le pied gauche (ne serait-ce que pour faire un créneau) Pour quelqu’un n’ayant jamais conduit une DS, ce n’est pas la BVH qui va poser des problèmes ,mais l’accoutumance à la direction assistée très réactive et aux freins. (trajectoires louvoyantes très hasardeuses et violents blocages des roues) Mais ça c’est juste au début, la bête s’apprivoise très vite.
En conduite très très sportive, mais je doute que beaucoup s’y aventurent encore, il est parfaitement possible en utilisant les points morts hydrauliques (entre les vitesses) de pratiquer un double débrayage.Blasphème ? non conduite à la cravache à 18 ans (et plus)

Les femmes appréciaient particulièrement la conduite des DS à boites hydrauliques . Elles qui sont si critiques envers les voitures, si elles ont été aussi nombreuses à en prendre le volant, ce n’est certainement pas sans raison.

Pour clore cet article, la grande question: Pourquoi Citroën n’a-t-elle plus jamais réédité cette boite ? Mis à part un problème de coût de fabrication, j’avoue ne pas comprendre . Je pense avoir utilisé à peu près tout ce qu’il peut exister comme pilotage de boites à vitesses :Automatiques, semi automatique, séquentielles, électriques ,avec overdrive, de motos , boites de 4×4…  Aucune d’elles ne possède l’agrément de la boite de DS. Et si encore j’étais le seul à le dire, on pourrait m’accuser de partialité ! Seulement voilà, si on ouvre un sondage sur le sujet on va friser les 100/100 d’avis identiques. Il doit bien y avoir une raison . Non ?

Salva

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5 comments

  1. patounet 30 mars, 2016 at 20:29

    Bonsoir à tous les amoureux de la Déesse!

    Bravo pour cet article, que je me permets humblement de compléter…

    Mon père m’a appris à conduire sa DS 21 Carbu à BVH de 1968, sur des petites routes de campagne, en Italie, alors que je n’avais que 12 ans. Autre époque, moins soumise aux peurs et protectionnismes de tous ordres, mais combien éducative.

    Alors, pour moi, conduire une DS BVH: c’est la norme, la base, une évidence, que rien n’a rejoint depuis, parmi les nombreux véhicules que j’ai conduits!
    Elle n’a que des qualités, notamment la quasi impossibilité de caler, progressivité, douceur, sécurité, etc : intéressant pour le (très) jeune conducteur débutant que j’étais.

    Un seul bémol pour compléter votre liste: il m’est arrivé dans une grande courbe, abordée à bonne vitesse en rapport 4, vue la grande souplesse du système, de descendre sous la barre de régime qui déclenche le débrayage : désagréable, mais c’est ma faute.

    Je suis preneur des « il y a une solution » annoncées.

    Amitiés.
    Patounet

  2. nico-59 5 avril, 2016 at 11:33

    Salut,

    Je suis comme vous les gars, je n’ai jamais compris l’arrêt de la BVH avec l’arrêt de la DS. Goutter, c’est approuver. Et regretter lorsqu’on reprend une voiture normale (le fameux syndrome du conducteur qui chiale le lundi matin en partant au boulot avec son déplaçoir quotidien, après avoir surfé en DS tout le dimanche).

    Un autre mystère : ce qui pouvait pousser un acheteur de DS neuve à la commander avec une boite manu en option… Au risque de me faire assassiner un jour, une DS en boite manu, ce n’est qu’une ID plus chère à l’achat (bon j’exagère un poil, certains me parleront de moteur, de finition, de freinage, mais quand même…).

  3. salva 5 avril, 2016 at 21:59

    Pour le début des années 70, je vois tout de même une raison qui a fait vendre des boites mécaniques: Le cinquième rapport. Il n’était alors une possibilité, offerte que par très peu de constructeurs (pour des voitures de grande série). Si Alfa-Romeo utilisait depuis les années 50 de telles boites, côté Françaises c’était le désert. Il a fallu attendre 1974 pour que Renault en équipe sa R16 TX , ( je ne sais même pas si les R8 Gordini ou Alpine A 110 recevaient un 5 eme vitesse) Du côté des Peugeot , rien en vue , même en 1975 (1978 pour le coupé 504 ,mais pour la berline que nenni) Simca et Panhard pas d’avantage . La boite 5 était alors un bel argument de vente qui, une fois de plus mettait, la DS au dessus du lot. Les boites 5 ont mis encore des années après la fin des DS pour se démocratiser et devenir la norme .
    Il y a eu aussi, les vrais réfractaires à la boite Hydraulique. Leur démarche était sans doute la même que les gosses qui décrètent sans appel, qu’un aliment est « imbouffable » (immangeable pardon) alors même qu’il ne l’ont jamais gouté.
    Mon grand père, qui s’offrait toujours la derniere Traction sortie, a quitté Citroën pour rejoindre Peugeot tant il a refusé la DS . Mon paternel , n’a acheté que des DS à boites mécanique, il faisait une allergie à la boite hydraulique. Mais à leur décharge (ou finalement à leur charge) ni l’un ni l’autre n’ont jamais voulu essayer la boite hydraulique . Même au début des année 80, lorsque j’ai eu ma premiere DS il n’y a pas eu moyen de leur faire tester. Une mule, même lorsque c’est une vieille mule, reste une mule .
    Quant à dire que la DS sans boite Hydraulique n’est qu’une ID, la vérité n’est pas si loin. L’ID a été délibérément faite pour ceux qui avaient peur de la sophistication de la DS et pour qui le passage traction /Ds était psychologiquement insurmontable. Mais à vouloir faire trop peu… Un utilisateur de 11 ou de 15/6 n’allait certainement pas se contenter d’une ID .La fuite chez Peugeot était inéluctable . Je donne une seconde fois raison à Nico 59 pour les dernieres DS/ID . Elles sont finalement très proches . Une ID20 (Dsuper) avec quelques options d’époque et on n’est pas loin de la DS20 confort à boite mécanique.. Mise à part la pédale de freins, il n’y a pas grand chose pour les différencier. On peut même arriver à une Dsuper mieux équipée qu’une DS20 avec, pour les dernieres, la même motorisation
    Citroën a assassiné la derniere ID en la faisant passer pour une DS . Et oui ! la carte grise d’une Dsuper5 adopte la mention DS21 ,et pourtant c’est une ID (une Dsuper) équipée d’un moteur de DS21 .Elle aurait logiquement du reprendre l’appellation d’ ID21 sur la carte grise. Mais bon ! On arrivait à la fin. Finalement seule la boite Hydraulique (quand elle l’avait) et le champignon de frein, ont fini par différencier les deux (à moins d’être née Pallas)
    Pour les éventuels maux de tête à me lire ,les aspirines sont sur le rayon, en haut à gauche. 🙂
    Salva

  4. anieder 25 mai, 2016 at 22:51

    Salut Salva

    Merci pour cet article. J’ai essayé le double débrayage. Et quoi dire. Ça marche.
    Et belle coïncidence. Yves Frelon aussi en a écrit ce mois.

    D’ailleurs. Moi aussi je serais très intéressé à apprendre les solutions pour les pannes avec la bvh.

    Bien cordialement

    Andreas

  5. salva 9 juin, 2016 at 21:05

    Salut Andreas

    Désolé pour cette réponse très très tardive, mais le temps me manque souvent. Heureux de te retrouver ici.
    Bravo pour avoir tenté le double débrayage, je ne pensais pas que quelqu’un s’y aventurerait. Si tu es un peu téméraire, alors je te donne une autre astuce qui permet de gagner au minimum environ 10 kml/h en sortie de virage.
    Juste après le double débrayage, pose ton pied gauche en léger appuie sur le champignon de freins et écrase l’accélérateur. La Ds va passer le virage avec une facilité et une agilité que tu ne soupçonnes même pas.
    Tant que j’y suis je te donne une des astuces dont je parle.
    Le jour inévitable où ta boite restera bloquée sur la première ou la marche arrière, la solution est simple.:
    Avec un cric, il te faudra lever une des roues avants, suffisamment haut pour que la pression hydraulique ne la repose pas au sol. Ensuite, sans utiliser le frein de parking, tu démarreras le moteur de façon normale. La roue soulevée va tourner le temps que les pressions hydrauliques se stabilisent. Puis, comme par magie elle va s’arrêter, et la boite se débloquera.. Il ne restera plus qu’à remettre la DS sur ses roues.
    Je ne suis pas plus retourné sur le site d’Yves que sur le mien ces derniers temps. Mais ma curiosité n’y résistera pas longtemps.
    A bientôt Andreas.
    Salva

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